Record pour les films français à l’exportation

par Nathaniel Herzberg

La Lettre AFC n°184

Le Monde, 17 janvier 2009

Le cinéma français va encore pouvoir claironner. Après les excellents chiffres de fréquentation dans les salles françaises, annoncés la semaine dernière, les résultats des entrées à l’étranger crèvent, à leur tour, les plafonds. Avec 77,6 millions de spectateurs hors des frontières, le cinéma français dépasse les 75,9 millions d’entrées de 2005.

Compte tenu de certains résultats non encore collectés, Unifrance – l’organisme de promotion du cinéma français – annonce que la barre des 80 millions sera dépassée. Depuis quinze ans, autrement dit depuis que les chiffres sont collectés, on n’avait jamais fait mieux.
Si 2005 devait son succès à un film – La Marche de l’empereur, de Luc Jacquet – le record 2008 tient à un homme, Luc Besson. Parmi les quatre films les plus vus par les spectateurs étrangers, trois sortent de son entreprise, Europacorp. Il est vrai que tout avait été fait pour ça : des films tournés en anglais, sur des arguments internationaux, avec des vedettes anglo-saxonnes : le marché visé n’était en rien l’Hexagone. Du reste, Babylon AD, de Mathieu Kassovitz, n’avait pas atteint le million d’entrées, bien peu compte tenu des moyens investis. Son casting international fait cette fois mouche. Avec 10,1 millions de spectateurs, il est premier.

De même, Taken et Liam Neeson en ancien espion défendant sa famille, ou Le Transporteur 3 ont respectivement séduit 8,8 et 7,3 millions d’étrangers. Seul Astérix aux Jeux olympiques parvient à s’immiscer à la deuxième place. Là encore, les 6,8 millions d’entrées nationales n’avaient pas permis de rentabiliser le film français le plus cher de l’histoire (79 millions d’euros). La distribution européenne a, cette fois, fonctionné, puisque c’est en Europe qu’il enregistre l’essentiel de ses 9,1 millions d’entrées.
Avec 17 millions de billets vendus, les Etats-Unis demeurent toutefois le premier marché étranger pour les films français. Les productions en langue anglaise s’y imposent, naturellement, mais Ne le dis à personne, de Guillaume Canet ou Il y a longtemps que je t’aime, de Philippe Claudel, s’y comportent très bien.

Les cinq mêmes qu’en 2007
Comme l’an passé, la Russie prend la deuxième place. Pour Unifrance, ce phénomène s’explique d’abord par l’augmentation récente du nombre de salles, le développement des multiplexes et l’équipement en projection numérique. Derrière Le Transporteur 3 et Astérix, les Russes ont plébiscité Mesrine : l’Instinct de mort.
Allemagne, Espagne, Italie, Grande-Bretagne, Mexique : les cinq suivants sont là, les mêmes qu’en 2007. Simplement, le Mexique, malgré un nombre d’entrées en augmentation, passe de la troisième à la septième place. Les autres ont, il est vrai, explosé tous les compteurs.

Dans ce palmarès, Bienvenue chez les Ch’tis poursuit ses succès. En Belgique, il atteint 1,1 million d’entrées, meilleur résultat jamais atteint par un film français. Mais plus surprenant, la comédie française fait un triomphe en Allemagne avec 1,3 million de spectateurs, « en route vers les 2 millions », croit pouvoir annoncer Unifrance.
Et le cinéma d’auteur, dans tout ça ? Il reste minoritaire, on l’aura compris. Pourtant, Persepolis de Marjane Satrapi a séduit 1,3 million de spectateurs dans 22 pays, en 2008 (400 000 déjà en 2007). La Graine et le Mulet d’Abdellatif Kechiche a été vu par plus de 700 000 personnes. Quant à la dernière Palme d’or du Festival de Cannes, Entre les murs de Laurent Cantet, il ne fait que commencer sa carrière, mais a déjà rassemblé 625 000 cinéphiles étrangers.
(Nathaniel Herzberg, Le Monde, 17 janvier 2009)