Entretien avec Oualida Bolloc’h et Laaziz Kheniche de la société Panavision Alga Techno

par Claude Garnier

par Claude Garnier La Lettre AFC n°189

A l’occasion du dernier Festival de Cannes, Claude Garnier, AFC s’est entretenue avec Oualida Bolloc’h et Laaziz Kheniche (Panavision Alga Techno) au sujet des impressions qu’ils ont ressenties lors de leur présence cannoise.

Claude Garnier : Depuis combien d’années venez-vous à Cannes ?

Laaziz Kheniche : C’est la première fois.

Oualida Bolloc’h : Depuis cinq ans.

LK : Moi je suis venu au Festival de Cannes principalement pour rencontrer les directeurs de la photo dans un autre cadre, et puis pour aller aux projections.

CG : Quelle est ta première impression ?

LK : Pas évidente ; je devais monter les marches pour la projection du film d’Audiard dont le matériel de prise de vues a été fourni par Panavision Cinecam. Je me suis retrouvé en bas des marches en smoking et puis pas de place.

OB : Oui je n’ai pas pu obtenir les places que j’avais demandées. Nous demandons les places à la Ficam et pour cette occasion j’en avais demandées neuf expliquant qu’il y avait Alga, Cinecam et Marseille. Mais je n’ai obtenu que deux places sur les neuf demandées !

CG : Comment ressens-tu cette situation ?

OB : Très mal, je ne suis pas sûre que tout le monde soit logé à la même enseigne. C’est de plus en plus difficile d’avoir des places, Même sur un film où nous sommes partie prenante.

CG : J’ai la sensation que ce problème de places intervient à un moment ou on demande de plus en plus d’effort aux prestataires pour se couler dans un mode de production complexe.

OB : Oui c’est tout à fait paradoxal. C’est vrai aussi que dans le même temps les productions nous donnent de moins en moins la possibilité d’avoir tout simplement des affiches des films encore moins des DVD. Je trouve qu’il y a de moins en moins de considération dans la profession. C’est toujours à toi, prestataire, d’aller quémander les choses. De tous les films projetés cette année, il y en a seulement deux qui m’ont invitée aux projections à Cannes sur les neuf projets. Dans ce contexte, venir au Festival de Cannes devient de plus en plus difficile et contraignant.

CG : Quels films avez-vous l’intention d’aller voir ?

LK : Je voudrais bien voir le Lars Von Trier, mais je sais pas. Et puis je voulais voir le film d’Audiard. C’était prévu… Mais bon, la question, c’est la répartition des places. C’est pas le nombre de places.

OB : Oui c’est la répartition des places qui est différente et qu’on ne ressentait pas avant.
Est-ce que cette répartition est faite en fonction des élus locaux, des sponsors, je n’en sais rien. Ce que je sais, c’est qu’avant on n’avait aucun souci pour avoir des places ; ça c’est certain.
Du coup, ça enlève du charme à ce festival. On a moins de plaisir à y venir.

CG : Moi, ça fait une vingtaine d’années que je viens à Cannes. Et j’ai pu voir en prenant mes places auprès des syndicats de techniciens, la réduction drastique du nombre de places accordées à notre secteur, au fil des ans. On voit bien que les membres de l’AFC qui se déplacent à Cannes sont majoritairement dans l’impossibilité de se rendre aux projections faute d’invitation.

OB : Oui c’est devenu très difficile

CG : Est ce que ta venue au Festival de Cannes relève d’une initiative personnelle ?

OB : Non, c’est Alga qui m’envoie ici. J’y viens pour pouvoir y rencontrer des clients. Bien sûr je peux aussi les rencontrer à Paris, mais ici c’est plus convivial. Ça change le mode de rencontre ; Alga pense aussi que c’est important de venir à ce festival pour représenter la société. On n’est pas là pour négocier des contrats, on est là pour montrer qu’on est présent. C’est une démarche de prestige.

CG : Dans ce sens, la question de la billetterie peut paraître assez symbolique d’un problème de considération de notre profession (techniciens et prestataires techniques).

LK : C’est clair. Il y a des gens qui sont lésés.

OB : Nous venons aussi pour être proches des directeurs photo et des directeurs de production. Ils ne viennent pas beaucoup parce qu’ils ne sont pas invités. Ils n’ont pas forcément les moyens.

LK : Moi j’aime bien rencontrer les directeurs de la photo ici. On peut parler des films qu’ils ont faits, qu’ils vont faire. Je peux les conseiller, prendre du temps avec eux.

OB : Ce qui manque, c’est un endroit convivial à Cannes qui permettrait de retrouver tous les gens de la profession. Là par exemple, Panavision organise une journée à la CST et c’est vrai que ça fait plaisir de voir les directeurs de la photo et les gens de la profession qui vont venir nous voir, avoir des discussions à la fois techniques et autour du cinéma.

CG : C’est toujours un plaisir de discuter avec vous, d’échanger sur ce qui se passe aujourd’hui dans le métier.
Comment les gens s’adaptent ou pas à la nouvelle donne aussi bien technique que dans la manière de produire les films ?
Vous avez très bien compris notre situation et par rapport à ça nous sommes vraiment partenaires.

Merci pour ce bon moment passé ensemble (Claude Garnier).