Festival de Cannes 2024

Caroline Champetier, AFC, nous décrit sa dernière collaboration avec Leos Carax

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C’est pas moi est un autoportrait de Leos Carax composé de séquences récentes, d’extraits de ses films, d’archives photographiques personnelles et publiques, d’images trouvées sur la toile, de titres et de textes. Il y a donc un paradoxe à ce que l’image me soit attribuée, je le prends comme une reconnaissance de notre lien autour des images, de ses films précédents, de celles tournées pour ce moyen métrage de 40 minutes et peut-être aussi du souci à intégrer une image venant d’ailleurs à un ici de cinéma. (CC)

Nous avons tourné une semaine et demie en équipe évolutive avec une Sony Venice 2 et un Alpha 7SIII, des optiques très différentes adaptées à chaque séquence, du matériel électrique ou machinerie quand nous en avions besoin, puis une journée en studio pour la course de baby Annette sur "Modern Love" et tapis roulant pour laquelle Florian Sanson et Margot Remaury avait confectionné une réjouissante palissade à petite échelle suspendue à des portants à vêtements.

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Leos Carax a monté seul, en franc tireur pendant plusieurs mois, ce qui laissait augurer une postproduction compliquée. Elle le fut. Sourcer puis obtenir en haute définition (pour parfois revenir à leur version Internet) et négocier les droits de toutes ces images a été un travail héroïque, même chose pour les droits musicaux.

Toute ces images de textures, couleurs, résolution différentes ont atterri chez Frédéric Savoir et nous nous sommes interrogés à trois sur chacune d’elle, comment redonner de la matière à la séquence du procès de Merde (segment de Tokyo) tourné avec une DVX100 en 2008, unifier une suite d’images paternelles, film Super 8, photos virées, photos couleurs sursaturées, sans supprimer le sentiment d’étonnement que toute nouvelle apparition apporte, quelle suite donner aux dictateurs qui attisent la haine partout dans le monde et en faire une famille visuelle sans esthétisation, surimpressionner des éclairs à la séquence ou Nastia joue du piano.

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Quand on travaille sur des images qu’on a produites, quelque chose du geste à parfaire, une certaine obsession est à l’œuvre, composer une partition avec des images venant d’ailleurs nous place solidement au niveau du sens, de leur sens propre et de celui que le cinéaste lui attribue dans sa partition, c’est passionnant, drôle, insolent parfois.

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Reste une série de ces images qui fait suite à un extrait de L’Émigrant, de Charlie Chaplin, images diffusées à la télévision, reprises dans les journaux, des corps d’enfants échoués sur une plage de Méditerranée, celles-là brulent les yeux.