Entretien avec Laurent Mannoni
Directeur du patrimoine de la Cinémathèque française et du Conservatoire des techniques cinématographiquesUne histoire simple
J’ai découvert la Cinémathèque à l’âge de huit ans, lorsque ma mère m’a amené voir un film de Fritz Lang, Les Nibelungen. J’ai été transpercé par ce film, comme au moment où Siegfried est traversé par sa lance, j’ai vraiment été ébloui par le cinéma de cette époque.
Plus tard, quand j’étais adolescent, vers 12 ans, 13 ans, j’ai commencé à fréquenter la Cinémathèque de façon assidue et j’ai eu la chance de rencontrer Lotte Eisner, qui avait fait le Musée du cinéma avec Langlois et qui avait travaillé à la Cinémathèque avant la Guerre. C’était une grande figure, elle avait connu Murnau, Fritz Lang, Brecht, Louise Brooks... Elle m’avait pris en amitié et tous les samedis, j’allais chez elle parler cinéma.
Et c’est elle qui m’a dit : « Tu devrais t’intéresser aux débuts du cinéma, à tout ce qui touche la technique du cinéma, parce qu’il y a très peu de choses en France ». J’ai commencé à chercher des ouvrages et voir la littérature sur le sujet, et j’ai constaté qu’il n’y avait effectivement rien, hormis l’excellent livre de Jean Vivié publié en 1946, Traité général de technique du cinéma, un livre formidable, mais qui s’arrêtait très tôt dans la chronologie. C’était le premier volume – il n’a pas pu publier son deuxième tome.
Et à partir de cette époque, j’ai commencé à me spécialiser dans l’histoire des techniques cinématographiques, tout en continuant à me passionner pour le cinéma d’une façon générale, avec une attirance pour les films muets, les films anciens, les films des années trente, etc.
J’ai publié mon premier livre sur la naissance du cinéma en 1994 (Le grand art de la lumière et de l’ombre : archéologie du cinéma, éd. Nathan), ouvrage obsolète aujourd’hui parce qu’on a tellement trouvé de nouvelles informations ; c’est une œuvre de jeunesse, j’étais vraiment jeune à l’époque... Mais ce qui est drôle, c’est que j’avais décidé de faire une histoire générale de la naissance du cinéma, alors que maintenant je fais plutôt des microhistoires de sujets très précis.
Après, j’ai passé une thèse de doctorat sur l’histoire technique du cinéma à travers la figure d’Etienne-Jules Marey. J’ai passé cette thèse sans suivre véritablement de cours, car comme vous le savez, il n’y a pas de cours, hélas, à l’université à l’heure actuelle qui soit dédiés à l’histoire des techniques pré-cinématographiques. Mais cela bouge maintenant depuis quelques années ; des maîtres de conférence commencent à se spécialiser, notamment à Paris III, mais ils sont encore peu nombreux.
Collectionneur, pour la beauté de l’objet et le plaisir des yeux...
Avant d’entrer à la Cinémathèque, j’ai commencé à collectionner des appareils, j’essayais de trouver des archives, des témoins de la préhistoire du cinéma, des débuts du cinéma, mais c’était une collection qui n’avait rien à voir avec ce que j’ai découvert à la Cinémathèque en y entrant en 1994. La collection de la Cinémathèque est prodigieuse.
Ce qui est intéressant, quand je suis entré à la Cinémathèque, c’est que la collection était stockée dans des conditions assez déplorables, il faut le dire, dans les sous-sols du palais de Chaillot. Elle était encore en partie dans des cartons, les cartons de la collection Will Day. (Voir note en bas de l’entretien, NDLR)
Ç’a été l’un des plus beaux moments de ma vie, parce que j’ai découvert une collection merveilleuse, pas cataloguée, et vraiment il y a eu un travail de fou à faire. C’était fabuleux parce que tout était à établir, et la collection était là, intacte, avec des pièces uniques, des choses formidables.
On a découvert, par exemple, la première caméra de Méliès qui était par terre, recouverte de poussière, et je ne mens pas parce que j’ai pris les photos, et je les ai toujours. En fait on a compris que c’était celle de Méliès en la démontant. Il y avait des objets partout, et même des appareils précieux emballés dans des sacs en plastique... Des découvertes fabuleuses...
Cette collection, au fil du temps, on est arrivé à l’enrichir énormément, d’abord grâce à des donateurs, des cinéphiles, des collectionneurs, des cinéastes, des techniciens, qui ont généreusement donné à la Cinémathèque des pièces parfois fantastiques. Et on est arrivé à plus que la doubler, puisqu’au départ il y avait 1 450 pièces qui ont été cataloguées dans l’ouvrage paru en 1996 (Le mouvement continué – Catalogue illustré de la collection des appareils de la Cinémathèque française, éd. Mazzotta), et maintenant, il y en a plus de 4 000.
Et le rythme des dons s’est accru encore et considérablement depuis que l’on a fondé le Conservatoire des techniques, il y a deux ans. Et j’en suis ravi parce que grâce aux conférences, grâce au réseau de gens fidèles et intéressés que l’on a réussi à se faire dans ce milieu, grâce à des gens comme vous qui font un peu de publicité aussi pour ça, grâce à des gens comme la CST, grâce à des industriels et des techniciens comme Jean-Pierre Neyrac, comme Jean-Pierre Beauviala, grâce à eux la collection devient vraiment importante, l’une des plus belles collections au monde, avec 4 000 machines.
Mais aussi beaucoup d’archives, des plans de fabricants, on a plus de 6 000 plans qui viennent d’Eclair qui nous ont été donnés par Beauviala, des plans pièce par pièce, de caméra fabuleuses, imaginées par Coutant... Mais ces 6 000 dessins, de par leur format, sur papier calque, ne sont malheureusement pas encore consultables. La numérisation des archives est en projet.
On a les premiers plans de Coutant avant la Caméflex, le premier modèle date de 1945, qui ne s’appelait pas encore Caméflex mais Camérette, et c’est très émouvant, c’est signé à la main, c’est magnifique... L’un des grands problèmes à l’heure actuelle, c’est que les rares industriels de cinéma ne travaillent plus sur papier, d’où le problème pour conserver tout ça. Même Beauviala ne travaille plus sur papier, sauf s’il fait des crobards ; et alors, ceux-ci deviennent, selon moi, de vraies pièces de musées.
Jean-Pierre Beauviala a été d’une générosité inouïe pour la Cinémathèque ; en plus des archives Eclair, il a donné la fameuse caméra qu’il avait mis au point avec Godard, le prototype de l’Aaton 35. C’est quand même le dernier fabricant de caméras en France. Notre rêve serait de récupérer les archives Aaton...
Des collections comme celle de la Cinémathèque, il y en a au moins trois ou quatre vraiment importantes à travers le monde. Il y a une collection très importante à la George Eastman House à Rochester ; c’est la collection personnelle de George Eastman, on y trouve des trucs rarissimes.
Il y a aussi des collections en Allemagne ; à Berlin, il y a de très belles choses, une grosse collection à Postdam aussi. Il y a Bradford en Angleterre, mais à Londres, il n’y a plus rien. Le MOMI a fermé ses portes ; le Science Museum avait une belle section cinéma, c’est désormais fermé. La collection, qui comportait vraiment des pièces magnifiques, est allée rejoindre celle de Bradford.
Il y a de très jolies choses dans les collections privées en France. Il y a aussi des cinéastes qui collectionnent ; quelqu’un comme Jean-Jacques Annaud collectionne les caméras, il est très intéressé. Il y a des techniciens qui collectionnent : par exemple récemment, un technicien à la retraite nous a donné des choses merveilleuses, comme une très belle Parvo L avec tout son équipement dans des boîtes, des projecteurs, il les gardait pour le plaisir et la beauté de l’objet.
Collectionner, d’accord, mais restaurer...
Restaurer les documents ne pose pas de problème parce qu’il y a beaucoup de restaurateurs spécialisés, à qui l’on confie les documents ; il y a un budget pour ça. Les appareils, c’est plus complexe. Nous, on nettoie les appareils, mais on ne va pas entièrement les démonter – quand il s’agit de les démonter, c’est compliqué pour certains modèles –, les restaurer, nous ne sommes pas équipés pour ça. On s’adresse donc à des restaurateurs spécialisés dans les instruments de précision, il y en a très peu et ça coûte assez cher.
Depuis 15 ans, on restaure disons entre dix et vingt appareils par an, que l’on remet vraiment en état. Prenons le cas d’un pionnier qui s’appelle Audibert. Il a fait beaucoup de tentatives dans le cinéma en couleurs : il a fait de l’Autochrome, du film à réseau lenticulaire, du film trichrome, du film multicouche, il a tout fait, au fil des ans, à partir des années 1910 jusqu’aux années 1930. Il se trouve que son neveu a découvert dans son garage le projecteur trichrome et les pièces qui vont avec, y compris les films nitrate ; il a tout donné à la Cinémathèque. Mais quand c’est arrivé, c’était rouillé, couvert de crottes de pigeon.
On a tout fait pour le restaurer et maintenant on a tout, les optiques trichromes, le projecteur qu’il avait fabriqué lui-même – un projecteur 65 mm trichrome à trois filtres. C’est un appareil unique, dans un état parfait, ce qui nous a coûté cher, mais on est très heureux de l’avoir fait ! Le réflexe intelligent, c’était de le donner à la Cinémathèque, parce que quelqu’un d’autre l’aurait envoyé à la benne, comme c’est arrivé mille fois.
Il y a des appareils qu’on récupère et qui sont vraiment en mauvais état. Par exemple, on a une caméra qui est rarissime, je n’en connais que deux exemplaires, c’est une caméra Debrie, qui date de 1930, pour du film 70 mm – c’étaient les premiers grands formats –, la Magnaflex, faite pour la Paramount, ce n’était pas pour les Français qu’elle avait été faite ! Elle est en fonte d’aluminium, recouverte de peinture givrée. Et quand on l’a récupérée, elle était dans un état déplorable, avec la peinture partie et la fonte d’aluminium qui commençait à se corrompre, parce qu’elle avait été mal stockée.
Le restaurateur a tout démonté, tout nettoyé, il a retrouvé, grâce à un vieil artisan, le secret de la peinture givrée et maintenant elle est dans un état parfait, on ne voit même pas qu’elle a été restaurée parce que c’est tellement dans l’esprit de l’époque, c’est vraiment une joie...
On ne va pas non plus aller mettre de l’argent dans la restauration d’un Pathé Baby qu’on nous donne et qui est en mauvais état, on sait faire aussi la distinction entre ce qui est important ou pas.
Entre musées, on échange très peu, et c’est dommage. On pourrait échanger... Par exemple, des Super Parvo Debrie, on doit en avoir six ou sept, c’est un modèle qui a marché longtemps. Alors je me dis pourquoi en garder six ou sept, c’est quand même absurde, ça devrait intéresser d’autres musées, mais c’est un peu dur au plan administratif... Les musées, vous le savez, ce n’est pas simple, ils n’aiment pas échanger parce que c’est inscrit dans leurs inventaires, et c’est bien normal...
Heureusement, nous avons un petit budget d’acquisition : chaque année on arrive à acheter des pièces importantes, ce qui permet de compléter notre collection.
Le problème de notre collection, et c’est aussi normal, c’est qu’elle n’est pas exhaustive. On cherche à compléter nos lacunes, mais aussi à enrichir encore nos points forts. Quand je suis arrivé à la Cinémathèque, pour prendre un exemple très simple, il n’y avait pas de projecteur 16 mm Debrie dans la collection, ce qui est absurde parce que ce n’est vraiment pas un projecteur rare ; et quand on nous en a donné un, j’étais ravi, évidemment. Nous en avons maintenant une dizaine ! Un autre exemple : il n’y avait pas la première caméra Parvo en bois, l’Interview, qui est parue en 1908, le premier modèle. J’ai trouvé cette caméra superbe et on a pu l’acheter il y a un an.
On arrive quand même à reconstituer le puzzle. Et mon rêve serait d’avoir tous les appareils fabriqués par Debrie, par exemple, y compris les tireuses et développeuses... C’est un peu utopique. En tout cas d’avoir le maximum de choses parce que Debrie est un fabricant exemplaire (que sont devenues ses archives ?), et aussi bien pour Eclair, j’aimerais avoir toutes les caméras Eclair, et je ne les ai pas encore. Parfois certains modèles sont très difficiles à trouver. Les Caméflex, ça va, ou peut en trouver 150, c’est un modèle qui a été tellement vendu, il n’y a pas de problème.
Un moment important de la collection, il y a une dizaine d’années, c’est quand la SFP a donné ses caméras et son matériel film ; on a récupéré une grosse quantité d’Eclair, d’Arriflex, de Mitchell, d’accessoires de prise de vues, une belle collection d’objectifs. C’était un moment assez exceptionnel. Kodak-Pathé nous a également confié les appareils de son ancien musée, ce qui montre bien que les professionnels nous font confiance.
Ce qui est intéressant dans la collection de la Cinémathèque, c’est qu’il s’agit de l’une des rares collections internationales. C’est-à-dire qu’on peut y trouver du matériel français évidemment, mais aussi beaucoup anglais, grâce à Will Day, mais aussi américain, allemand, italien, soviétique. Notre ambition est de constituer une collection qui puisse permettre de retracer quasiment pas à pas l’évolution de la technique des origines à nos jours. Et ce qui m’obsède un peu, c’est d’arriver à rattraper le jalon qui nous manque. Et j’ai honte de le dire, mais on n’a pas de caméra Technicolor trichrome ; on a une caméra bichrome, mais pas trichrome. Le jour où j’aurai ça, je pourrai me dire : « Tiens, là, on remplit une grosse lacune ! » En Angleterre, il en est passé une, mais à des prix colossaux...
Les techniques cinématographiques en conserve...
Le Conservatoire des techniques cinématographies a été créé il y a deux ans avec Serge Toubiana. L’idée m’est venue en partant du constat qu’on arrive à un moment très important de l’histoire des techniques.
D’abord les collections de la Cinémathèque commencent à devenir très importantes, il faut donc essayer de mieux les faire connaître, de mieux accueillir les chercheurs.
D’autre part, un autre constat simple est de dire que l’enseignement sur les techniques en France est en retard par rapport aux pays étrangers ; en Italie, en Allemagne, aux Etats-Unis, ils sont plus actifs que nous. En Italie par exemple, il y a beaucoup plus de thèses sur l’histoire des techniques qu’en France. Pourquoi ? C’est surprenant, alors qu’en France, on n’a pas moins de techniciens émérites qu’eux. Donc, une histoire des techniques peu enseignée, voire parfois mal enseignée.
Troisièmement, élément très important, le numérique arrivant, la technique bouge énormément, se métamorphose. Beaucoup de choses vont disparaître. Toutes proportions gardées, on estime que nous sommes un peu comme au passage du parlant, à la fin des années 1920, où énormément de films et appareils ont disparu parce que tout d’un coup il y a quelque chose qui est devenu obsolète.
Il est possible que ça se répète, on ne sait pas quand, mais ça commence déjà. Des labos sont démantelés de façon tout à fait sauvage, des salles idem, des métiers disparaissent, des connaissances vont disparaître, des tas de gens spécialisés deviennent inutiles sur le marché, c’est terrible. Les labos, ça va très vite en ce moment, et ça va aller encore plus vite, d’après ce que j’entends. Vous avez lu comme moi la presse, ce n’est pas brillant.
L’enjeu du Conservatoire, c’était à la fois d’essayer de garder la mémoire du patrimoine industriel des techniques du cinéma international. C’est une ambition un peu exagérée, mais dans l’idéal, ça serait ça, en tout cas du patrimoine français, ce qui serait déjà pas mal. Et d’essayer aussi de faire en sorte d’archiver et de garder la mémoire des pratiques.
Par exemple, Jean-Pierre Neyrac nous a appelé en disant : « Attention, il y a un labo à Bruxelles qui est en train de se démanteler, tu devrais y aller, etc. » On est allé à Bruxelles et on a rapporté quatre énormes Matipo anciennes, des gammeuses, des appareils extraordinaires, très beaux, qui fonctionnent encore, merveilleux...
La question est de savoir maintenant qui pourrait nous expliquer le fonctionnement d’une Matipo ? Il y a bien des gens, qui ne sont pas tout jeunes, mais quand ils ne seront plus là, qu’est-ce qu’on fera ? C’est ça la question qui m’intéresse.
Ce qui est important pour nous, et que l’on n’arrive pas encore tout à fait à mettre en place, en tout cas on essaye, c’est de capter la mémoire orale, les témoignages oraux des techniciens ; on est à une période où l’on peut encore retrouver ces techniciens. Mais une fois que l’argentique aura disparu et que l’on sera dans l’ère du tout numérique, ça deviendra de plus en plus difficile, et plus les ans passent, plus ça deviendra difficile, c’est évident.
Il y a là un enjeu important : si l’on perd la mémoire de cette technique-là, certes, on aura les appareils, mais nous n’aurons pas la connaissance, les secrets d’utilisation, les trucs, le savoir-faire, ce qui est donc dommage. Avec des modes d’emploi, on arrive bien sûr à tout saisir, mais c’est quand même autre chose que d’entendre un technicien nous expliquer le fonctionnement d’une Matipo. Sur la chimie de l’argentique, les émulsions, il y a un peu de littérature, heureusement ; Kodak et d’autres ont édité des manuels, mais derrière, il y a du savoir-faire qui n’est pas couché sur le papier... Les gens qui travaillent dans les usines de tirage ont aussi leurs propres souvenirs.
Pour nous, il est important est de suivre pas à pas ce passage au numérique, qui s’accélère, d’étudier le phénomène et de sauver le maximum de choses. Y compris les premiers pas de la technique numérique, qui va devenir très vite obsolète.
On a par exemple récupéré l’un des premiers projecteurs Christie exploité en France, c’est une machine énorme, avec trois objectifs interchangeables, machine qui a coûté une fortune à l’époque, et qui est complètement obsolète alors qu’elle date de l’an 2000 !
Un autre enjeu du Conservatoire, assez ambitieux, serait de publier un ouvrage collectif qui serait une sorte d’encyclopédie de la technique cinématographique, parce que je crois que l’on est au moment où il faut publier ça. Si vraiment un jour on arrive au tout numérique, il s’agirait de faire l’état des lieux sur ce qui a été fait sur plus de cent ans en pellicule, en émulsions, en lumière, en optiques..., sur tous les sujets. Il me semble qu’on est à un tournant intéressant pour faire le point, pour dire : « Bon, voilà ! Cent-vingt ans de pellicule, qu’est-ce qu’on a fait, comment ça marchait, comment en est-on arrivé là… et où va-t-on ? »
Conférences et journées d’études
L’autre ambition de Conservatoire était de se donner un rendez-vous mensuel et, grâce à des conférences, d’explorer un sujet précis ; depuis deux ans, on a accueilli pas mal de gens. On a fait des journées d’études aussi, sur des sujets précis, avec des salles pleines. On va faire une journée d’études en décembre sur la 3D, qui peut attirer du monde, je l’espère.
Ce qui nous intéresse naturellement, c’est d’inviter à la fois des historiens, des techniciens, des hommes de l’art, des cinéastes, des opérateurs – on a travaillé avec Willy Kurant – des industriels aussi, Neyrac, Beauviala.
Le public qui assiste aux conférences dépend beaucoup des sujets abordés ; parfois, il y en a qui sont très pointus. Nous avons eu François Ede, on va inviter par exemple Bernard Tichit, l’année prochaine... Mais quand on a invité Jean-Pierre Beauviala, c’était un grand moment pour tout le monde. Elle était géniale cette conférence, parce qu’il y avait d’un côté des appareils de la fin du XIXe siècle et puis la Penelope, à l’autre bout, un rêve, quoi ! La conférence a été filmée, comme d’autres, et d’ailleurs on envisage de mettre en ligne le contenu des conférences, en audio ou vidéo.
La prochaine conférence, en octobre, est sur Emile Reynaud et ses successeurs, parce qu’on accompagne l’exposition en cours. Mais l’année prochaine, nous allons refaire quelque chose avec Willy Kurant sur la caméra mobile, ce serait passionnant. C’était superbe ce qu’il a fait sur la lumière, un vrai plaisir. Le programme est déjà complet sur deux ans en fait, et il y a tellement de sujets à explorer... L’année prochaine, j’aimerais bien faire une journée d’études sur les studios, parce qu’il y a là aussi des choses qui bougent et qui sont intéressantes. Et il y a là aussi très peu de littérature sur ce sujet.
Les premiers résultats du Conservatoire des techniques de la Cinémathèque sont plutôt encourageants et il faut continuer à faire des conférences, à collecter, à sauver, à remettre en état, à montrer.
L’appel que vous pouvez lancer, vous les chefs’op, à tous ceux que cela préoccupe, c’est de dire : « Attention, ne jetez rien, la Cinémathèque est intéressée par tous les aspects de la technique cinématographique, y compris les plus pointus ». Nous, on est ravis de pouvoir sauver appareils, films et archives, les restaurer, les cataloguer, les exposer, les mettre à disposition des chercheurs et des musées, etc.
(Propos recueillis par Jean-Noël Ferragut en septembre 2009)
Will Day (1873-1936), premier collectionneur d’objets et archives cinématographiques
Fils d’un " lanterniste " amateur, l’Anglais Will Day consacre sa vie à rassembler, dès 1900, les quelque 2 000 pièces d’une collection qu’Henri Langlois et la Cinémathèque française achèteront à ses fils au tout début des années 1960 et dont plusieurs dizaines d’appareils ne sortiront de leurs caisses qu’à l’occasion de l’ouverture du Musée du cinéma au palais de Chaillot en 1972.