L’éditorial d’octobre 2023

Par Jean-Marie Dreujou, coprésident, avec Claire Mathon, de l’AFC
Le réchauffement climatique, dont on peut de plus en plus mesurer les effets, nous amène aujourd’hui à réfléchir sur le choix de nos outils (projecteurs, caméras, postproduction).

Le Dino Light est l’un de mes projecteurs préférés, je l’ai souvent utilisé :
- en extérieur jour, où mélanger sa température de couleur de 3 200 Kelvin me permet de moduler la lumière du jour,
- en extérieur nuit, où les 4 rampes de lampes étant réglables, la plage de ce projecteur est impressionnante,
- en intérieur, où le flux d’un Dino Light 24 lampes traversant une fenêtre recouverte de tracing paper donne un modelé au décor et à un visage à mon sens irremplaçable.

Seulement voilà, il lui faut 24 000 W !
24 000 W, c’est comme si on utilisait 12 fours domestiques à 210° en même temps !
12 fours domestiques à 210° pour une source lumineuse, n’est-ce pas un peu démesuré ?

Le cinéma a toujours été énergivore, et je pense que, dans certaines circonstances, ce projecteur est indispensable, mais regardons bien les nouveaux outils mis à notre disposition quand nous relisons nos listes…

Il existe de plus en plus de projecteurs LED qui offrent une puissance très confortable.
Par contre la construction de ces projecteurs LED doit nécessiter beaucoup d’énergie et de ressources, mais c’est un autre sujet où, comme pour l’automobile, on peut se demander s’il vaut mieux avoir une voiture construite récemment ou un véhicule déjà manufacturé depuis un moment.
Vaste sujet auquel je ne sais pas répondre….

Du côté des caméras maintenant :
L’Alexa 65 est certainement une de mes caméras préférées, et c’est avec celle-ci que j’ai tourné le film Kaamelott. Je pense que pour ce projet cette caméra était adaptée, et nous étions vigilants sur le volume de data.

Mais réfléchissons bien, tous les projets nécessitent-ils les 8K de définition proposés par nos nouvelles caméras ?
Il n’y a pas si longtemps le 2K était déjà une révolution !
Nous devons utiliser la résolution de nos caméras avec justesse.

Sur certains tournages maintenant, on ne coupe plus la caméra entre les prises.
Le nombre de data doit être impressionnant en fin de journée….

Alors, si nous n’avons pas la réponse à tous les problèmes que nous nous posons, je pense que c’est le bon sens qui devrait s’imposer, mais dans le cinéma, le bon sens est-il la priorité ? Et, quelle que soit la puissance de ses outils, le cinéma ne doit-il pas rester une machine à fabriquer illusion et magie ?