Patrick Grandperret, le grand frère
Par Dominique Gentil, AFCSon premier film est un documentaire sur la coupe Kawasaki, compétition à laquelle il a participé comme pilote. Dans cet univers des championnats de moto qu’il connaît bien, il réalise en 1980 Court circuits.
Patrick travaille comme un artisan du cinéma. Pour lui, créer, mettre en forme une histoire répond à un besoin vital. Dans un inconfort nécessaire, pour lequel il pouvait tout risquer, il avait besoin de se mettre en danger. Son seul luxe, être libre et autonome.
Pour mener à bien ses projets, il avait acquis caméras et tables de montage. Ses films prenaient forme dans une succession de tournages et de montages jusqu’à ce qu’il trouve celle qui était juste. Mais avant, jamais satisfait, il remettait perpétuellement son film sur l’ouvrage. Patrick avait besoin de temps pour faire aboutir ses films comme il l’entendait. Prendre le temps nécessaire et ne jamais lâcher prise. Cette admirable obstination était rude, pour lui comme pour son entourage. Patrick s’immergeait d’un univers à l’autre : moto, marginalité, drogue, rock, Afrique, Amérique latine ont nourri sa créativité.
Les bureaux de sa production étaient un lieu de vie. Il y avait toujours de nouvelles têtes et des rencontres improbables entre potes, ceux du cinéma, de la moto, de la musique… On y faisait la cuisine. Mais, pour travailler et discuter sérieusement, il fallait s’échapper au café du coin.
Pour beaucoup d’entre nous, Patrick était le grand frère. Il rassurait. On aimait sa gentillesse, son ouverture d’esprit, son écoute et surtout son énergie. Avec Patrick, rien d’impossible…
En 1979, le metteur en scène Claude Faraldo - Themroc, Bof… (anatomie d’un livreur) - ne trouve pas à financer Deux lions au soleil et perd son avance sur recettes. Sans hésiter, Patrick finance le projet en hypothéquant son appartement ! Ce qu’il a fait pour Claude Faraldo, il a su le faire pour beaucoup d’autres cinéastes, devenant partenaire de production ou prêtant caméras et salle de montage.
Ce samedi, au cimetière de Saint-Maur, que de visages amis ! Chacun savait ce qu’il avait reçu de toi. Comme toi lorsque tu tournais, nous avons pris le temps, beaucoup de temps, avant de nous quitter.
Un dernier mot pour dire aussi à sa famille Emilie, Martin, Léo, leur maman Dominique, ainsi que Octave et Aurèle et leur maman Yvonne.
Toute notre affection, votre papa était exceptionnel...
En vignette de cet article, Patrick Grandperret dans les années 1980 - Photo Bernard Fau