Emporté dans le tourbillon d’énergie d’Agnès Varda
Par Eric Gautier, AFCEt je me suis trouvé emporté dans un tourbillon d’énergie, d’inventivité, d’imagination, de fantaisie. Une liberté joyeuse et créative. A l’image de sa mythique maison de la rue Daguerre, tout un dédale de souvenirs glanés pendant toute sa vie. Des documents, des objets, des photos, des costumes empilés dans un labyrinthe fascinant. Mais elle savait (presque) tout retrouver…
Elle avait un plaisir, tous les jours, de tourner ce film qu’elle réinventait sans cesse. On s’amusait beaucoup. Elle imaginait plus un collage, un divertissement, plutôt qu’un film classique sérieux. J’y ai appris de ne pas avoir peur de la liberté de créer. C’est la leçon que j’en ai retirée, et qui m’accompagne toujours : si le plan est intéressant, s’il a son charme ou provoque de la surprise, alors il faut le tourner, sans se soucier des raccords académiques. J’ai retrouvé le même état d’esprit quelques années plus tard avec Alain Resnais.
Elle faisait bien la cuisine. Elle était généreuse et m’a accueilli souvent dans des moments difficiles de ma vie. C’était réconfortant de parler du travail du deuil avec elle.
Elle avait son tempérament, têtue et pugnace. Elle obtenait toujours ce qu’elle voulait. Par exemple, l’emplacement de la tombe de Jacques Demy, au cimetière Montparnasse, sous un grand arbre, avec un banc juste en face pour se poser et se recueillir, apaisé. C’est là où elle demeure aujourd’hui.
Je l’ai revue régulièrement, je l’ai aidée à tourner des images pour ses installations (dont les magnifiques Veuves de Noirmoutier). Puis elle a continué à tourner toute seule ses images, grâce aux petites caméras numériques, comme elle avait commencé chez Jean Vilar avec son appareil photo…