Ma cinquième "Sortie des usines Lumière" à Lyon en tant qu’opérateur à la caméra
Par Gilles Porte, AFCC’est la 5e fois que j’opère à Lyon, où je suis né. Si certains paramètres sont immuables, il y a en a un qui change chaque fois : qui va orchestrer la Sortie des usines Lumière, rue du Premier-Film, cette année ? Après les frères Dardenne (2020), Jane Campion (2021), Tim Burton (2022) et Wim Wenders (2023), c’est au tour d’Isabelle Huppert d’être honorée avec une plaque à son nom, dévoilée le jour-même sur les murs de l’Institut Lumière.

D’ordinaire il y a trois caméras : une argentique, une numérique, côte à côte, exactement à l’emplacement de celle des frères Lumières, avec le même objectif, et une 3e, avec un zoom Angénieux Optimo 24-290 mm, pour immortaliser des invités très VIP qui se prennent pour des ouvriers, le temps d’un passage devant les caméras.

Cette année, pour la première fois, la caméra argentique n’est pas conviée et cette sortie 2024 ne sera donc que numérique, réservée à deux caméras Sony F65. Il aura donc fallu que Pierre-William Glenn - à qui l’AFC doit sa présence ici – se retire définitivement pour que l’argentique disparaisse rue du Premier-Film aussi.
Alors que des barrières sont installées à trois mètres des caméra pour contenir les photographes officiels et le public, je m’interroge sur un point : quelle va être l’attitude de celle qui passe du rôle d’actrice à celui de réalisatrice, devant toutes celles et tous ceux qui voudront la photographier, officiellement ou non officiellement ? Chacun sait, dans la profession, qu’Isabelle Huppert est une des actrices qui fait le plus attention à son image...

Premier élément de réponse quand Rachida Dati vient me retrouver avec Thierry Frémaux, sans Isabelle Huppert, pour recueillir quelques informations. La propension de notre ministre de la Culture à se faire photographier aux côtés des caméras est finalement inversement proportionnelle à celle dont la mission du jour est d’orchestrer la sortie.

Deuxième élément de réponse quand Thierry Frémaux me demande, quelques minutes plus tard, du gaffer pour bien signifier aux VIP là où les invités doivent marcher. Isabelle Huppert se tient à l’écart, près de la grille de l’Institut Lumière.
Comprenant que cette sortie sera finalement très différente des précédentes et que la réalisatrice du jour ne s’approchera pas de l’œilleton de la caméra ni même du moniteur installé à son égard, je vais la retrouver, au côté de Sandrine Kiberlain.

Je lui désigne la caméra qui filme, très exactement à l’emplacement de celle des frères Lumière. Afin de bien la différencier de l’autre caméra, Maxime (assistant caméra) à entouré le pare-soleil avec un gaffer rose.

C’est finalement le seul contact que j’ai avec Isabelle Huppert.
Quand je filme la sortie avec l’Angénieux 24-290 pour immortaliser cet instant, j’ouvre mon œil gauche et je vois le bras d’Isabelle dessiner de grandes arabesques derrière un mur en béton pour diriger les VIP qui passent devant elle avant de défiler devant la caméra, un par un, puisque c’est ainsi qu’en avait décidé Isabelle Huppert.