Salles obscures sous toutes les coutures en France...

où, quand, comment, pour qui... grâce à une récente étude du CNC

1 - Communes équipées de salles de cinéma
Les salles sont surtout implantées dans les communes urbaines. Les centres des grandes villes sont généralement mieux dotés en salles que leurs banlieues. Mais, l’implantation de multiplexes à la périphérie des plus grandes communes françaises compense progressivement ce déséquilibre depuis quelques années. 73 % des entrées sont réalisées dans les agglomérations de plus de 100 000 habitants.
L’indice de fréquentation augmente avec la taille de la commune, et avoisine ou dépasse les 5 entrées par habitant et par an dans les unités urbaines de plus de 100 000 habitants.
Au sein des unités urbaines, l’équipement proposé aux spectateurs potentiels est comparable, quelle que soit la taille de l’agglomération : un fauteuil est disponible pour 31 à 52 habitants.

Diversité des communes, éventail de prix
Le prix du billet est, en moyenne, plus élevé dans les communes les plus peuplées. Le billet coûte plus de 6,16 euros en moyenne à Paris et environ 5,10 euros dans les plus petites communes.

Augmentation contrastée de la fréquentation
En 2001, la fréquentation a progressé de 12,2 % en France par rapport à 2000. La hausse de la fréquentation touche davantage les petites communes rurales que les grandes agglomérations. Les unités urbaines de plus de 100 000 habitants enregistrent les plus faibles progressions d’entrées entre 2000 et 2001.

Paris, capitale du cinéma
Paris dispose d’un patrimoine de salles de cinéma unique au monde. En 2001, 373 salles regroupées dans 94 établissements étaient en activité. Les salles parisiennes ont réalisé plus de 31 millions d’entrées en 2001, soit 16,8 % de la fréquentation nationale et 8 % de plus qu’en 2000.
Avec la réouverture de la Pagode, tous les arrondissements de Paris sont désormais équipés. Au total, plus de la moitié des salles sont concentrées dans 5 arrondissements qui accueillent plus de 55 % des spectateurs de la capitale.
En 2002, selon le nouveau mode d’attribution des aides, près de 40 % des établissements parisiens sont classés Art et Essai.

2 - Cartographie du cinéma
Le tiers des salles dans treize départements
En 2001, 5 241 salles regroupées dans 2 186 établissements étaient en activité. Elles comprenaient un peu plus d’un million de fauteuils, soit quelque 12 000 de plus qu’en 2000. Treize départements rassemblaient le tiers des salles, vingt-trois en rassemblaient la moitié.
Les départements les mieux équipés en salles de cinéma ne sont pas seulement ceux dans lesquels sont localisés les principaux pôles d’activité et de population du territoire. Parmi eux se trouvent aussi des départements dont l’équipement cinématographique est dimensionné de manière à accueillir la clientèle touristique en saison.

La moitié des entrées dans quatorze départements
Paris arrive largement en tête avec 31,3 millions d’entrées. Le Nord et le Rhône dépassent les sept millions d’entrées. Les Bouches-du-Rhône totalisent 6,7 millions d’entrées. Dans quatorze autres départements très urbanisés, le nombre d’entrées est supérieur à trois millions en 2001. A l’autre extrême, le nombre d’entrées est très faible dans des départements ruraux : moins de 120 000 en Lozère, 179 000 en Corse-du-Sud, 182 000 en Haute-Corse et 185 000 dans la Creuse.

56 départements au sein des 21 régions métropolitaines sont équipés de multiplexes
Fin 2001, 56 départements possédaient au moins un multiplexe, contre 47 en 2000, 38 en 1999, 26 en 1998, 23 en 1997 et 8 en 1996. Pour 34 de ces départements, notamment les plus récemment équipés, la fréquentation a évolué plus favorablement que la fréquentation nationale.
Toutes régions françaises (exceptée la Corse) étaient ainsi dotées d’au moins un multiplexe à la fin de l’année 2001.

Près de 30 % du parc Art et Essai sont concentrés sur deux régions
873 établissements de cinéma bénéficient, à ce jour, du classement Art et Essai portant sur leur activité 2000-2001. Les régions les plus urbanisées sont les mieux dotées en établissements Art et Essai : l’Ile-de-France et la région Rhône-Alpes en rassemblent plus de 27 %. Le Nord-Pas-de-Calais fait exception puisque, pour une population de près de 4 millions d’habitants, la région compte seulement 20 établissements classés. En revanche, la Bretagne recense 73 établissements Art et Essai malgré un équipement en salles majoritairement rural.

Budget 2003 : le CNC donne un coup de pouce à l’avance sur recettes
Le directeur général du CNC, David Kessler, a présenté le 23 octobre un budget 2003 marqué par la stabilité. A la différence des autres directions dépendant du ministère de la culture, financées sur fonds publics, 94 % des sommes que gère le CNC proviennent de prélèvements alimentant le " compte de soutien ". Celui-ci permet les aides, automatiques ou sélectives au cinéma, à la production audiovisuelle, à l’édition vidéo et au multimédia.

Ce compte de soutien est alimenté pour un quart par la TSA (taxe sur les billets de cinéma), par des taxes sur les chaînes de télévision pour 72 %, et par une taxe sur la vidéo, pour quelque 4 %. Il est affecté à 53 % à l’aide au cinéma et à 47 % à l’audiovisuel. Pour 2003, le CNC table sur une recette globale du compte de soutien de 449,29 millions d’euros (+ 3,75 %). Cette hausse s’explique par la légère augmentation prévue de la fréquentation des salles en 2002, qui devrait atteindre 188 millions d’entrées (186 millions en 2001), pendant que la stagnation des recettes publicitaires des chaînes de télévision, donc de leur contribution au fonds, devrait être compensée par l’explosion des revenus de la vidéo (+ 42,3 %).

La partie " cinéma " du compte de soutien devrait représenter 229,11 millions d’euros, soit une hausse de 4,8 %. 146 millions d’euros seront affectés aux aides automatiques, dont 53 millions à l’exploitation, 3 millions à la vidéo, et 90 millions à la production et à la distribution. Le 23 octobre, un distributeur a regretté que ces deux secteurs soient mélangés, la production s’adjugeant la part du lion et bénéficiant de la baisse attendue de la part de marché des films français (la taxe est prélevée sur les entrées de tous les films et reversée aux seuls producteurs français).

Le geste le plus significatif au sein de ce budget est, comme l’a souligné David Kessler, la hausse de 10,1 % des fonds alloués à l’avance sur recette, qui subit en ce moment une pression particulière du fait de la saturation des autres mécanismes d’aide (Lire sous la rubrique revue de presse l’article paru dans Le Monde du 8 octobre. NDLR).
Le directeur général en a profité pour rappeler l’importance de ce mécanisme, qui a aidé à la production de quelque 600 films depuis dix ans. Il a également souligné l’effort significatif du ministère qui, malgré des contraintes budgétaires fortes, a augmenté sa contribution de 1,9 %, la portant à 28,98 millions d’euros.

M. Kessler est revenu sur des " chantiers " en cours. Il a évoqué la mission confiée par le ministre de la culture, Jean-Jacques Aillagon, à Serge Toubiana concernant la politique patrimoniale - annonçant la mutation du Service des archives du film et du dépôt légal en Archives françaises du film (AFF) - et la mission confiée à Jean-Pierre Leclerc sur le financement du cinéma.

Dans un environnement très affecté par les mésaventures de Canal+, les propositions de modifications du système attendues pour janvier 2003 constituent la prochaine échéance. Le patron du CNC a enfin évoqué les futurs débats internationaux, en particulier dans le cadre de l’Organisation mondiale du commerce, en se déclarant « confiant » dans la construction d’une « idée désormais partagée » par les autres pays européens en matière de soutien au cinéma, et dans la défense de ces principes dans une arène internationale : « Ce n’est pas un problème de droit de la concurrence mais de survie. Sans soutien public, il n’existerait tout simplement pas de cinémas européens », a martelé M. Kessler.
(Jean-Michel Frodon, Le Monde, 25 octobre 2002)