Bis Repetita

Il y a de ces films qui nous marquent par l’alchimie qui opère au tournage. Bis Repetita en fait partie.
Tout d’abord, Bis Repetita est le premier long métrage d’Emilie Noblet à qui je suis fidèle depuis notre rencontre à La Fémis. Emilie a suivi le cursus image avec moi. Elle a fait plusieurs longs métrages à la photo (dont le très marquant Jeune femme, de Léonore Seraille) avant de se dédier totalement à la réalisation, pour mon plus grand bonheur.

Lorsque l’on attaque la préparation de Bis Repetita, nous avons déjà tourné son court métrage de diplôme, Trucs de gosses (déjà produit par Arthur Goisset, chez Topshot…) et depuis 3 Séries ("HP" - S01, "Parlement" - S01, "Les 7 vies de Léa" - S01).
Nous nous connaissons donc très bien et particulièrement sur le terrain de la comédie dans lequel elle excelle.

Lucie Baudinaud à la caméra et Emilie Noblet
Lucie Baudinaud à la caméra et Emilie Noblet


Bis Repetita est une comédie romantique qui rencontre le cinéma d’auteur, avec la générosité de celle qui aime rire et qui sait faire rire. C’est en cela que l’alchimie a opéré dès le premier jour de tournage : des acteurs hyper drôles entourés d’une équipe technique qui se connaît depuis une dizaine d’années et se retrouve avec joie.
Cela a permis une confiance et une fluidité dans les échanges autour de la fabrication du film qui nous aura amené, je crois, à proposer un premier long métrage maîtrisé et drôle.

Dans le travail de l’image et sa grammaire visuelle, nous avons assez vite dessiné les traits que porterait le film : il y avait chez Emilie la volonté de faire se rencontrer la spontanéité de l’improvisation dans le jeu de ses comédiens, avec des propositions stylistiques que nous avions déjà expérimentées sur ses tournages précédents.
Pour cela, mon travail était de proposer des dispositifs techniques presque transparents pour sa mise en scène, ponctués de propositions plus chronophages dans leur mise en oeuvre.
Ce mélange permet aux multiples strates du scénario de s’exprimer. En comédie il me semble important de savoir identifier les espaces pour ce mélange. Si certains plans peuvent rythmer la narration globale du film, il faut néanmoins savoir quand une simplicité s’impose : c’est alors la dynamique du jeu des comédiens qui prend toute sa place.

Aussi, et c’est comme à chaque fois le nerf de la guerre : tout cela doit être combiné avec un plan de travail très serré, dans un budget non étirable…

Découpage

La mise en scène d’Emilie part des comédiens. Elle ne découpe presque pas en amont.
En préparation, nos réunions découpage sont principalement constituées d’échanges autour d’extraits que je lui propose pour nourrir des idées de plans en mouvement.
Nous identifions les endroits qui vont nécessiter une réponse en matériel plus poussée et une fois que les grandes lignes sont placées, je travaille à leur mise en œuvre financière et technique.

Par exemple, à l’arrivée de la Villa des Ludis Latini à Naples, Emilie voulait un seul et même mouvement qui parte du contre-bas de la villa et termine avec notre bande de français à l’intérieur de celle-ci. Il nous aura fallu commencer au drône (un Freefly alta8 + nacelle FreeFly Movi Pro) pour passer au-dessus des escaliers extérieurs, ensuite décrocher la caméra de celui-ci pour continuer au Ronin, au plus proche de la figuration et enfin terminer en travelling circulaire autour de Louise et ses étudiants, à l’intérieur de la villa. Il y a sur ce plan un rattrapage d’environs 7 diaphs que j’opère, pendant que Stéphane Aupetit, Walter Romad et Lucien Durris, de chez DroneCast, opèrent les différentes étapes du plan.
A la fin du film, la sortie de Louise Bourgoin de la villa se fait via un top-shot circulaire, une référence directe à Bridget Jones. Nous avons choisi de l’opérer via une Tête 3D (la Mini Scorpio Stabilized Head V) en déport sur une petite grue placée au troisième étage de la villa.
A l’inverse, la journée de tournage à Pompéï ainsi que la majorité des extérieurs du film se sont faits en équipe très légère, caméra à l’épaule.

Photogramme


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Lumière

Je connaissais Xavier Lacaille de la saison 1 de "Parlement", mais aussi comme réalisateur. Avec Louise Bourgoin, Noémie Lvovsky et, bien sûr, cette formidable bande de jeunes surdoués de l’impro (Issa Perica, Rosie Bocardi, Elias Bonada, Gabrielle Garcia, Stylane Lecaille) il est prudent de ne pas prévoir de travailler la lumière de "trop près" : cela laisse place aux pépites d’improvisations dont Emilie et Clémence Carré, la monteuse, sont très friandes.
Il m’aura fallu un certain temps pour trouver la bonne approche en lumière : celle qui me permet d’accompagner cette liberté sans sacrifier l’esthétique globale du film.
Si au cours de nos premières collaborations avec Emilie, un sentiment de vertige pouvait découler de cette méthode, c’est aujourd’hui un travail avec lequel je suis en parfaite adéquation.

Naples en janvier

Nous avons tourné à Naples, au mois de janvier : l’envie d’Emilie était qu’il y face beau, que l’on sente le soleil à tous les endroits de ce voyage scolaire, qui va marquer une renaissance pour le personnage de Louise Bourgoin.
En janvier, les journées s’arrêtent à 16 heures et la météo peut etre très orageuse.
L’essentiel de mon travail a été de préciser, en étroite collaboration avec Maxime L’Anthoën, l’assistant mise en scène, l’organisation des séquences entre elles pour optimiser ces temps de tournage : amplitudes horaires de chaque journée, les travailler en continu pour profiter de toute la course du soleil, étudier la possibilité d’inverser certaines entre elles pour préserver un maximum le beau temps sur les extérieurs.
Parfois, cela m’a demandé certains sacrifices, comme de calquer les fenêtres du décors de la salle d’examen pour le rééclairer avec des 9 kW HMI en continu sur la journée : en effet, le nombre de plans estimé indispensables à la réussite de la séquence dépassait amplement la course du soleil…
Dans le choix des décors intérieurs, je veillais à toujours avoir au moins un axe "aveugle" et possiblement plusieurs plans à y tourner par bloc de journée : cela me permettait de sécuriser les variations météo et les amplitudes horaires.

Couleurs pop, direction artistique assumée

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Emilie, au fil de ses projets, a su s’entourer dans tous les départements de personnes de confiance.
Au cours de premières réunions artistiques, nous avons très vite trouvé un axe commun : on voulait donner à ce film des couleurs franches.


Au fil de la préparation nous avons constitué un Mood Board par séquence, principalement issu des tonalités impulsées par les décors. Le budget ne nous permettant que peu d’interventions d’ampleur sur ceux-ci, nous avons cherché à les accorder, tant en lumière, qu’aux costumes, enssembliage et accessoires, pour que l’ensemble donne une unité formelle engagée.

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C’est la première fois que j’ose un tel parti pris dans les couleurs chaudes. Nous avons fait des essais lumière et étalonnage pour les effets sodium que je voulais presque rouges. Après différents tests en LED, l’équilibre qui nous convenait s’est trouvé dans des sources tungstène + 3 full CTO…

Optiques Primo AL Close Focus

En comédie, cela nous plait beaucoup d’utiliser la dynamique horizontale des courtes focales tout en resserrant le champ vertical plus allongé propre à l’anamorphique.
Cela faisait longtemps que je lorgnais sur les AL… Leur taille et leur poids représentent un certain engagement qu’il faut considérer en lien étroit avec la mise en scène.

Xavier Lacaille et Lucie Baudinaud à l'œilleton
Xavier Lacaille et Lucie Baudinaud à l’œilleton


Emilie a voulu prendre ce pari et s’est largement approprié ce qu’on appelait leur "sens de l’humour" : la distance de mise au point avec peu de déformations optiques si proche de la caméra donne une certaine dynamique qui accentue le comique des comédiens (principalement filmés au 50 mm). Cela passait aussi par la caméra et ses mouvements, souvent faits avec le 40 mm de la série.
Pour les besoins de certaines séquences plus légères Panavision a su nous compléter d’une série Primo Classique qui se mélange parfaitement avec cette série.

Pour finir je souhaite remercier l’engagement de toute l’équipe pour ce film qui a pu bénéficier d’un savoir faire artistique et technique précieux, ainsi que nos fidèles prestataires, Panavision et Micro Climat Studios, qui ont su nous accompagner avec une grande confiance.

Bande-annonce officielle


https://youtu.be/Xv9dL7AY8dI

Équipe

Premier assistant opérateur : Alexis Cohen
Chef électricien : Rémy Barbot
Chef machiniste : Bruno Cellier
Opérateur Steadicam : Stéphane Aupetit
Etalonnage : Charles Fréville

Technique

Matériel caméra : Panavision (Arri Alexa Mini LF ; optiques séries Primo Close Focus anamorphiques et Super-Speed, ainsi que des Leitz 19 et 24 mm en FF pour le drone)
Matériel lumière : Panalux
Matériel machinerie : La Machinerie Fine (Bruno Cellier)
Labo : Micro Climat studios
Drone : Dronecast (Marseille)

synopsis

Delphine (Louise Bourgoin), prof de lettres désabusée, a un deal bien rôdé avec ses élèves : ils lui fichent une paix royale, elle leur distribue des 19/20. Mais la combine se retourne contre elle quand ses excellents résultats (fictifs) propulsent sa classe au championnat du monde de latin, à Naples. Comble du cauchemar, c’est le neveu très zélé (Xavier Lacaille) de la Proviseure (Noémie Lvovsky) qui est choisi comme accompagnateur. Pour sauver l’option latin, et surtout sa situation confortable, Delphine ne voit qu’une solution : tricher !