EclairColor, le Technicolor du XXIe siècle ?"
Par Clarisse FabreEclairColor : le nom sonne comme le Technicolor, qui a marqué l’histoire du cinéma dans les années 1940-1950. Avec cette technologie mise au point par le groupe Ymagis, le cinéma serait-il embarqué dans une nouvelle aventure industrielle et artistique ?
Il est trop tôt pour savoir si EclairColor sera la prochaine frontière de la couleur à l’ère numérique. Car ce procédé de traitement de l’image au cinéma, qui promet davantage de lumière, de contraste, de définition et de détails à l’écran, pose de nombreuses questions, esthétiques et industrielles.
Le chef opérateur Eric Guichard (Saisons, de Jacques Perrin et Jacques Cluzaud) est plutôt séduit : « L’outil me semble adapté plutôt pour les films à grand spectacle, en extérieur. J’ai vu des essais et cela me fait penser au Technicolor. On retrouve la puissance du 35 millimètres en termes de brillance et de saturation des couleurs. » Son confrère Stéphane Le Parc (Brice 3, de James Huth) souligne que « cet outil redonne de la profondeur à l’image, mais il faut y aller doucement. Car on court le risque d’avoir une image artificielle ».
Le procédé a été mis au point par les laboratoires Eclair, rachetés en 2015 par Ymagis, spécialiste de l’équipement numérique des salles. « La télévision était en train de dépasser le cinéma, du point de vue de la qualité de l’image », explique Thierry Beaumel, directeur de fabrication postproduction image chez Eclair. « Il fallait agir et nous avons donc mis au point EclairColor. »
Nuances infinies
C’est à l’étalonnage – après le tournage et le montage du film – que l’image est retravaillée avec cet outil que l’on pourrait comparer à une palette virtuelle aux nuances infinies. Mais, pour montrer un film EclairColor, il faut être équipé d’un projecteur spécifique : le Sony 4K, lequel "envoie" deux fois plus de lumière qu’un projecteur numérique classique. Certaines salles en sont déjà dotées, d’autres pas. Va-t-il y avoir un cinéma à deux vitesses ? Thierry Beaumel se veut rassurant : « On ne va pas demander aux exploitants de s’équiper en EclairColor demain, mais de réfléchir à cette technologie quand ils rénoveront ou ouvriront une salle. »
Ymagis a sa stratégie toute prête : elle est la seule société au monde à pouvoir fabriquer les films EclairColor et vendre l’équipement. Mais il n’est pas question d’imposer un monopole, assure Thierry Beaumel : « L’idée est de proposer cette nouvelle technologie sous licence à d’autres labos. » Certains exploitants ont déjà sauté le pas, d’autres observent. « Nous avons mastérisé gratuitement quelques films en EclairColor et mis à disposition un projecteur dans des salles témoins », explique le directeur général d’Ymagis, Jean Mizrahi. Ainsi, l’Etoile Saint-Germain-des-Prés, à Paris, est la première salle à avoir projeté un film EclairColor, Aquarius, de Kleber Mendonça Filho, en octobre 2016. [...]
Clarisse Fabre, Le Monde, mardi 31 janvier 2016
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