L’Extraordinaire voyage du fakir

L’Extraordinaire voyage du fakir, c’est l’histoire d’Aja, un Indien, fakir de rue à Bombay. A la mort de sa mère, il décide de ramener les cendres en France, le pays où vivait l’homme dont elle était amoureuse. Ce voyage ne se déroule pas comme prévu et ces péripéties l’entraîneront en Angleterre, en Espagne, en Italie et en Lybie.

Nous avons tourné ce film à Bombay pendant deux semaines, puis six semaines en Belgique, une semaine à Rome et une dernière à Paris.
La rencontre avec Ken Scott s’est faite tardivement, deux semaines avant le début de la préparation. Le film se déroule dans une centaine de décors différents, tournés dans quatre pays. Nous avons entièrement découpé le film avec Ken, très souvent en sessions "Facetime vidéo". Je faisais les croquis et les plans sous le regard de mon iPhone. La plupart du temps, nous n’avions pas encore le décor mais l’important était de trouver l’esprit du découpage de chaque scène. Ce travail nous a rapprochés et m’a permis de comprendre le film qu’il voulait faire. Cette préparation nous a aussi permis de tenir un plan de travail très chargé.

Nous nous sommes rapidement accordés sur le principe de tourner en anamorphique pour apporter à l’image ce décalage avec la réalité souhaité par Ken. J’ai testé quelques séries et choisi les Cooke anamorphiques, qui ont le charme de leurs défauts, et j’aime leur réaction raisonnée aux flares.

Bérénice Bejo et Vincent Mathias
Bérénice Bejo et Vincent Mathias

Ken souhaitait que l’on ressente l’intensité des couleurs dans les décors indiens et trouver une identité colorimétrique propre à chaque pays traversé par Aja. De l’Inde et ses couleurs chatoyantes au centre de rétention anglais, froid et glauque…

Après des essais j’ai choisi la RED Weapon Dragon 6K pour sa richesse colorimétrique. Sa sensibilité est un peu faible pour tourner en anamorphique la nuit mais nous avions peu d’extérieurs nuit sur ce film.
Concernant le traitement des rushes, ils étaient vérifiés par le laboratoire, mais pas étalonnés. La LUT Dragon Color 2 et Redgamma 4 servait sur le plateau et au laboratoire.

J’ai choisi de travailler avec Lionel Kopp pour l’étalonnage. J’aime la texture de l’image qu’il crée et sait gommer l’aspect trop lisse et clinique de l’image numérique. Ken avait tourné tous ses films en 35 mm et s’inquiétait de retrouver une texture plus "organique".

Tournage en Inde
Tournage en Inde


A Bombay, seule Zoé Vink, première assistante caméra du film, m’a accompagné. Les autres assistants étaient indiens : data manager, seconds assistants et focus puller deuxième caméra. Nous sommes venus à Bombay avec notre série Cooke Anamorphique et nos zooms Angénieux Optimo 24-290 mm (bloc anamorphique arrière) et 30-72 mm. Le reste a été pris sur place : les deux RED Weapon Dragon avec tous les accessoires. A noter que nous avons tourné en mai à Bombay, température entre 36 et 40 degrés. Malgré des mises en garde, la caméra a très bien fonctionné.

Ecole de rue en Inde
Ecole de rue en Inde


En Inde, les seconds assistants caméra, un par caméra, sont employés par le loueur et s’occupent de la mise en place du matériel sur le plateau. Le premier assistant ne s’occupe que de la mise au point.
J’ai eu la chance de travailler avec un excellent chef électricien, Ganesh Hedge, ainsi qu’avec Ninad Nayampally, brillant chef machiniste. Ils étaient heureusement disponibles pendant notre période de tournage. Chacun d’eux a créé sa propre société de location et sont très bien équipés. Ils ont des plannings de tournage assez impressionnants, enchaînant les films les uns après les autres !

Intérieur en Inde
Intérieur en Inde

Après l’Inde, nous avons tourné en Belgique tous les décors intérieurs des pays européens, ainsi que les extérieurs Angleterre et Lybie.
Le plus grand décor intérieur était celui du magasin Ikea. La marque n’ayant pas donné son accord, la déco a créé un magasin de 600 m2 dans un lieu vide. Nous avons dû aussi installer l’éclairage ! 55 plaques LED Versatile, toutes reliées en DMX pour permettre un contrôle de l’intensité et de la température de couleur. C’était un gros prélight.

Les extérieurs nuit dans le village anglais ont été tournés en banlieue de Bruxelles, L’aéroport de Barcelone à Liège, le port de Tripoli à Anvers et le camp libyen de réfugiés dans une carrière de sable en Wallonie…

Tournage du camp libyen en Wallonie
Tournage du camp libyen en Wallonie

Deux parties du film ont nécessité des plans VFX plus complexes.
Poursuivi par un tueur, Aja quitte Rome en montgolfière, survole la Méditerranée avant de s’échouer. A Rome, seule la nacelle de la montgolfière a été tournée sur place. Le ballon est toujours entièrement numérique. Aja monte dans la nacelle et décolle. Une grue a permis de créer ce début d’ascension.

Montgolfière à Rome
Montgolfière à Rome

Les plans de la nacelle en vol ont été tournés sur fond vert. Au départ, j’aurais préféré les tourner en extérieur pour le réalisme de la lumière. Mais cela aurait nécessité des conditions météo particulières : grand soleil et pas de vent. Conditions impossibles à réunir avec les moyens du film et son plan de travail. Nous avons donc tourné en studio et reproduit une lumière du jour solaire avec ciel bleu. Les pelures Rome et côtes méditerranéennes sont de nature diverse : photographies et plans drone DJI Inspire 2. Les pelures ciel et mer sont entièrement numériques.

Documents VFX
Documents VFX

A la fin du film, Aja lance un avion en papier depuis la tour Eiffel. Celui-ci survole Paris et se pose au cimetière de Montmartre. L’avion est entièrement numérique et les plans en vol ont été tournés avec le drone DJI inspire 2.

Tournage sur la Tour Eiffel
Tournage sur la Tour Eiffel

Il était prévu que les plans drone servent simplement de pelures, autant pour la nacelle de la montgolfière que pour l’avion en papier, mais ces plans ont finalement été exploités en plans larges classiques.
La caméra Panasonic X5R de l’Inspire n’est pas vraiment adaptée pour raccorder avec une caméra de cinéma numérique. Après une débayerisation rigoureuse et un travail particulier d’étalonnage, nous nous sommes approchés d’un résultat satisfaisant.

J’étais heureux de tourner ce film atypique qui a le charme d’un conte, toujours à la frontière de la réalité. Il aborde aussi avec tact la condition des migrants d’aujourd’hui.
Ce fut l’occasion de belles rencontres, Ken, les acteurs indiens, les équipes indiennes romaines et belges... Tourner en Inde est une expérience vraiment singulière et filmer Rome, c’est très émouvant…

L’Extraordinaire voyage du fakir
Réalisateur et scénariste : Ken Scott
Producteur et scénariste : Luc Bossi
Directeur de production : Pierre Wallon
Chefs décorateurs : Pascal Dechesne et Alain-Pascal Housiaux

Portfolio

Équipe

Première assistante caméra : Zoé Vink
Chef électricien : Didier Versolatto
Chef électricien Inde : Ganesh Hedge
Chef machiniste : Renaud Anciaux
Chef machiniste Inde : Ninad Nayampally

Technique

Matériel caméra, lumière et machinerie : TSF Belgique (RED Weapon Dragon 6,5K anamorphique, série Cooke anamorphique)
Drone Paris : Skydrone - Aeromaker
StudioVFX : Digital District
Superviseur VFX : Thomas Duval
Laboratoire numérique : Studio l’Équipe (sur Nucoda)
Etalonnage : Lionel Kopp, assisté de Julien Blanche