L’éditorial de juillet 2024

"N’oublions pas l’histoire ! L’histoire, le cinéma et la photographie de cinéma…", par Jean-Marie Dreujou, président de l’AFC
J’ai été stagiaire projectionniste dans un cinéma d’art et d’essai à Tours durant mes années lycée. J’ai découvert à cette époque le cinéma italien qui se penchait sur son passé, ce passé qui avait marqué le pays avant la dernière Guerre mondiale. La recherche photographique de ces films soulignait le propos des cinéastes, je me suis rendu compte de l’importance de la prise de vues cinématographique et ai décidé d’en faire mon métier.

1900, de Bernardo Bertolucci, parcourt l’histoire de l’Italie. La photographie de ce film est un acteur important, imposant une grande rigueur au film.
L’été représente l’enfance, l’insouciance. Puis arrive l’automne et l’avènement du fascisme, l’hiver représente son apogée, et le printemps la chute de la République de Salo.
Vittorio Storaro attendait systématiquement la bonne heure de la journée pour tourner les scènes et ainsi marquer les saisons avec une rigueur implacable…
Donald Sutherland, disparu dernièrement, y joue l’un de ses rôles les plus horribles de sa carrière.

Une journée particulière, d’Ettore Scola, en pleine période fasciste italienne où à Rome, le 6 mai 1938, Hitler rencontre Mussolini.
Antonietta, mère de famille nombreuse contrainte de rester à la maison alors qu’elle serait bien allée voir le Duce comme tout le monde, et Gabriele, intellectuel homosexuel qui, pour cette raison, a été exclu de la radio nationale où il était présentateur, et menacé de déportation, se rencontrent. Ils profitent de ce moment de pause pour s’affronter, se reconnaître, et finalement vivre d’intenses émotions...
À la fin de cette journée particulière, chacun va se retrouver de nouveau emprisonné : Gabriele sera arrêté par la police, et Antonietta se soumettra, comme avant, au devoir conjugal…
Pour accentuer le sentiment d’enfermement des personnages, Pasqualino De Santis a désaturé les couleurs, en utilisant un traitement spécial mélangeant la couleur et le noir et blanc.
Pasqualino De Santis a accompagné beaucoup de cinéastes traitant de sujets historiques et politiques, notamment avec Francesco Rosi.
Il est décédé d’une crise cardiaque sur le tournage de La Trève, de Francesco Rosi, adaptation du roman autobiographique La tregua, de Primo Levi, qui raconte le retour d’Auschwitz d’un groupe de survivants de l’Holocauste vers leur pays d’origine.
Pour ce film, Pasqualino De Santis avait aussi utilisé une image très désaturée dans les tons très froids.

Les sujets des films historiques que j’ai tournés me passionnent toujours…
Pour De Gaulle, de Gabriel Le Bomin, qui est un historien aguerri, nous avons effectué beaucoup de recherches et eu accès à des archives et témoignages originaux.
Ils sont passionnants mais glaçants…, tant on s’aperçoit que les grandes catastrophes sont souvent issues d’un ensemble de petits faits "anodins" et d’erreurs, dont s’emparent des personnalités malveillantes pour imposer leur vision et faire basculer l’humanité dans l’Apocalypse…

Mais… je vous parle de cinéma, et de photographie de cinéma…